INFORMATION:

Le chant des militants

Pourquoi ai-je choisi de jouer de la guitare dans une cabine téléphonique vouée à disparaître ? Parce que je me suis souvenue que cette cabine téléphonique était un espace pour tous, un lieu de partage publique, pudique.

Aujourd’hui, chacun doit être muni d’un téléphone personnel. Si tu n’as pas les moyens d’accéder à ce bien précieux, l’espace de partage “cabine” a disparu.

Disparu. Comme les lieux de rencontres festifs, bars du “coin”, cafés concerts au profit de festivals ou de grandes salles … Nous voici, voilà, noyés dans la masse et dans le besoin d’accumuler une somme d’argent souvent composée d’un billet au moins pour accéder à la musique ou à un appel téléphonique. Je me suis alors demandé pourquoi ne laisserions nous pas vivre les festivals mais en retrouvant les petits lieux de production de concerts et de rencontres. Ces lieux où pour le prix d’un verre tu papotes et écoute un jeune artiste qui fait ses premiers pas.

Voilà pourquoi j’ai accepté de me laisser photographier en “cabine”. Dans une démarche militante. La même démarche qui m’avait conduit à créer le Collectif A4 pour organiser des concerts à distance avec Quartier Libre à Bordeaux. Une démarche pour soutenir ces lieux, où même si tu n’as plus les moyens de posséder un téléphone, tu peux encore appeler avec quelques pièces de monnaie. Une démarche identique pour maintenir ces lieux de concerts et de rencontres que sont les cafés concerts où avec un peu de monnaie tu peux t’offrir une soirée qui crée du lien social tout en éloignant des écrans qui nous isolent et en écoutant un artiste qui se teste sur sa première scène. Voilà pourquoi entourée de Rod Stewart, en référence personnelle à un homme qui est mon ami , et de Manu Lanvin, en référence à celui qui a offert à mon fils de 11 ans de monter sur scène pour sa première partie, j’ai accepté de faire cette photographie. J’ai accepté cela alors que je pense comme certaines tribus que lorsque tu me photographies, je t’offre une partie de mon âme.

Texte: Sandrine Décembre.